Bulletin d’ information COVID du 22 août 2020

Chers vous tous,
La fin de l’été approche, pour beaucoup d’entre nous les vacances sont terminées. Il est
temps de refaire un point sur la situation de la pandémie actuelle.
Ce bulletin est écrit par Julia Drylewicz et moi-même. Bonne lecture.
Les mesures aux Pays-Bas se sont durcies et vont encore plus se durcir si les règles ne sont
pas respectées.
Les taux d’hospitalisation et de décès restent pour l’instant extrêmement bas, tout
simplement parce que ce sont majoritairement les personnes jeunes qui sont contaminées.
Plus de la moitié des contaminations journalières sont concentrées sur la région Randstad.
Quelques chiffres comparatifs France / Pays-Bas concernant le COVID-19, chiffres bruts puis
rapportés au nombre d’habitants (3 jours de marge pour prendre en compte les corrections
tardives) :
Nombre de nouveaux cas 13 – 19 août :
15.678 / 3.898 : comparable.
Nombre de décès 13 – 19 août
74 / 20 : comparable.
Nombre de nouveaux cas hospitalisés hors réanimation 13 – 19 août
1149 / 57 soit 5,3 fois plus en France
Nombre de nouveaux cas hospitalisés en réanimation 13 – 19 août
138 / 30 soit 1,2 fois plus en France
Nombre de patients hospitalisés hors réanimation au 19 août
4432 / 125 soit 9,3 fois plus en France
Nombre de patients en réanimation au 19 août
374 / 56 soit 1,75 fois plus
En fait les chiffres sont assez comparables si on prend en compte la tendance beaucoup plus
grande de la France à hospitaliser les patients aux premiers symptômes. L’absence de
chambre d’isolement en pression négative en dehors des réanimations explique le nombre
plus important de patients en réanimation en France.
Il nous semble important de revenir sur le port du masque.
En extérieur, en dehors d’une hypothèse controversée de protection dans les rues à forte
fréquentation, il ne semble pas que le virus se transmette facilement à l’air libre. À
l’intérieur, quand la distanciation physique n’est pas possible, c’est une autre question. Le
choix des Pays-Bas comme de la Suisse (en dehors de Genève) et des pays scandinaves de
restreindre le port du masque, obligatoire ou conseillé, suivant les pays aux transports en
commun et à certaines rues touristiques (Pays-Bas) peut être discutable.
La distanciation dite physique ou sociale semble être le plus efficace.
Prenons l’exemple de la France et citons quelques conséquences de l’obligation du port du
masque qui se généralise :
• Non-respect dans certaines villes comme Marseille où la police est impuissante.
• Port du masque en extérieur par une chaleur accablante.
• Masque en entrant dans un restaurant et enlèvement du masque pour aller s’assoir à
une grande table les uns serrés contre les autres.
• Masque porté sur le menton ou en dessous du nez.
• Masque jamais lavé.
• Masque mis dans la poche.
• Masque à usage unique servant une semaine.
Cherchez l’erreur !
Si on considère que cette décision du port du masque en extérieur de façon généralisée est
une décision arbitraire prise par des politiques à contre sens de l’avis de la majorité des
scientifiques, on est en droit de se poser la question des effets adverses de cette mesure
(épuisement, irritabilité, rébellion).
On ne voit pas vraiment de différence dans les chiffres pour l’instant des mesures différentes
ou diamétralement opposées prises par différents pays. L’exception est la Suède qui semble
avoir, à une région près classée orange, stabilisé la situation et l’Italie qui maintient une
grande discipline et a peut-être eu son pic de nombre de cas et de décès.
On sait que la majorité des contaminations prennent place dans la sphère privée, fêtes
improvisées de jeunes gens qui ont l’impression de ne pas vivre leur jeunesse si ça leur est
interdit, peut-être au prix de la contamination risquée voire la vie de leurs parents ou
grands-parents, fêtes religieuses comme l’Aïd récemment, messes avec chant et sans
protection, etc…
La reprise des écoles est un sujet très sensible qui pourrait être une bombe à retardement,
surtout chez les jeunes de plus de 12 ans. Il va falloir suivre l’évolution de la situation de très
près et le danger de propagation du virus est plus que réel si les règles ne sont pas suivies.
Le deuxième élément qui va être à surveiller est la fin de l’été. Comme dit au début de ce
bulletin, ce sont pour l’instant essentiellement des jeunes, vivant à l’extérieur, qui ont été
contaminés à l’exception de gens plus âgés qui sont en réanimation, la plupart suite à des
évènements cités plus haut, sans vouloir donner de détails.
La semaine prochaine va être marquée par un changement de temps avec une météo plus
incertaine qui va pousser tout le monde à vivre plus à l’intérieur. Ce changement va être
probablement suivi d’une recrudescence attendue du nombre de cas et pourrait marquer le
début d’une seconde vague.
Les théories du complot font fureur sur le net, avec même la complicité de professeurs de
médecine.
Par ailleurs les interviews de scientifiques prédisant la fin de la pandémie sur la base des
chiffres actuels ne font que pousser au relâchement et à l’abandon des gestes barrières, et
c’est beaucoup trop tôt.
Deux exemples :
Un affirmant une théorie du complot https://youtu.be/waICZiNYhq4
Un autre livrant une interprétation des statistiques plausible mais donnant de faux espoirs et
pouvant pousser au relâchement. Encore une fois, une grande majorité des personnes
contaminées sont jeunes et en bonne santé et ne laisse en rien présager de l’avenir.
https://www.youtube.com/watch?v=UP4DMvKNG68
Il suffit de prendre les États-Unis pour se rendre compte des effets néfastes de l’absence de
tout geste barrière en termes de propagation du virus, de nombre de cas, de saturation des
services hospitaliers et du nombre de décès (3ème cause aux U.S.A). Les États-Unis testent
massivement, avec ou sans symptôme, et la létalité (mortalité rapportée au nombre de cas)
ne descend pas en dessous de 3,15% (pour rappel : 0,1 % pour la grippe).
La mutation D614G (de D614 à G614) du virus est observée depuis un temps, le rendant
certainement plus contagieux mais pas plus mortel. La souche D614 est celle qui est apparue
en Chine, ce qui peut expliquer le nombre relativement plus faible de cas dans ce pays.
Quoiqu’il en soit : la variante G614 peut être plus infectieuse, mais proportionnellement pas
plus mortelle que D614. Un hôte mort est une impasse pour les virus, il est donc logique que
l’évolution optimise l’infectiosité tout en minimisant la virulence. 3,15 % de décès laisse au
virus assez de survivants pour continuer de se propager, donc pas de faux espoirs.
https://medium.com/microbial-instincts/what-the-d614g-mutation-means-for-covid-19-
spread-fatality-treatment-and-vaccine-7dda1c066f0d
Même si l’expression que l’espoir fait vivre est de circonstance, il ne faut pas s’attendre à un
affaiblissement du potentiel dévastateur du COVID-19 pour l’instant mais certainement dans
l’avenir si on suit l’évolution naturelle des coronavirus (1, 2 ou 3 ans, qui sait ?).
Si jamais au mois d’octobre ou au mois de novembre il ne s’est rien passé, qu’il n’y a pas
d’explosion du nombre de cas avec à nouveau saturation des hôpitaux, c’est seulement à ce
moment qu’on pourra tirer des conclusions sur une éventuelle maîtrise ou fin de la
pandémie : MAIS PAS MAINTENANT.
Les traitements : il faut bien reconnaître que même s’il n’y a pas d’avancées majeures, il y a
quelques bonnes nouvelles. Les grands espoirs à court terme sont :
• La dexamethasone qui finalement commence à faire ses preuves. Celle-ci est
administrée dès la dépendance à l’oxygène à h aut débit (optiflow) et COVID positif
depuis plus de 7 jours ou plus rapidement en cas de dégradation rapide. Si ce
protocole mène aux résultats escomptés, nous constaterons rapidement une
nettement moins grande proportion de patients devant être admis en réanimation.
• La mise sous anticoagulants plus précoce.
• Le plasma d’ex patients COVID, avec la déception que beaucoup n’ont plus ou trop
peu d’anticorps (ce qui ne dit rien sur la mémoire immunitaire protégeant au moins
pour un temps d’une deuxième infection).
• Quant au lait maternel de mères COVID + : cette hypothèse de traitement a déjà été
discutée il y a environ 3 mois. La piste reste cependant très intéressante et pourrait
déboucher rapidement sur un traitement simple et efficace.
Pour sortir des sentiers battus, cet article intéressant :
https://link.springer.com/article/10.1007/s10787-020-00744-0
À moyen terme, les anticorps spécifiques pourraient être une solution.
Quant aux vaccins, quand ceux-ci auront passé la phase 3 dans les règles de l’éthique
médicale (essais à grande échelle avec évaluation de l’efficacité, des effets secondaires,
etc…), on pourra en reparler. La Chine et la Russie faisant partie des pays qui ne respectent
pas les lois de bonne pratique clinique, ils peuvent se permettre quelques « dégâts
collatéraux » sans être inquiétés. Les enjeux économiques dans la course au vaccin sont tels,
qu’ils n’en sont pas à quelques vies près. C’est affreux, mais c’est la triste réalité.
Un dernier point pour ce bulletin est l’application CoronaMelder lancée partiellement cette
semaine par le gouvernement néerlandais. En néerlandais et en anglais :
https://coronamelder.nl/
Elle peut être téléchargée par tous mais n’est active pour le moment que pour les provinces
de Twente, Drenthe, Noord- et Oost-Gelderland, Gelderland-Zuid et IJsselland. À partir du
1er septembre elle devrait être active dans tout le pays mais seulement pour ceux possédant
des smartphones assez récents (au minimum iOS 13.5 ou Android 6.0), ce qui représente
89% de ces derniers et aval de l’autorité responsable de la gestion des données personnelles
Avant de débattre du traitement de données personnelles par cette application, essayons de
comprendre en quoi elle peut être utile dans le suivi de l’épidémie. Une des grandes
difficultés dans la lutte contre ce coronavirus est de contacter et tester un maximum de
personnes ayant été en contact avec une personne infectée (qu’elle soit symptomatique ou
non). Évidemment, les cafés, bars… collectent numéro de téléphone et parfois adresse email
pour pouvoir nous contacter en cas de présence d’un cas positif (parmi les autres personnes
présentes ou le personnel) au même moment que nous. Mais comment contacter une
personne assise derrière vous dans un bus, un train ou un tram ou la personne devant vous
dans la queue au supermarché ? Et bien c’est là que l’application est utile ! Elle permet si,
dans les deux dernières semaines, une personne dont vous avez été en proche contact (5-
10m) a été testée positive (car symptomatique ou parce qu’elle a été proche d’une personne
infectée) l’application vous le dira.
Cependant l’application ne vous dira pas où vous avez été en présence d’une personne
infectée et ne vous donnera aucune information sur son identité.
En cas d’alerte, vous pourrez contacter le GGD et leur communiquer le code anonyme
présent sur votre application. Vous pourrez être testés si vous le désirez (que vous
présentiez des symptômes ou pas).
L’idée est donc d’identifier un maximum de personnes potentiellement infectées et de les
tester.
Pour revenir rapidement sur la question des données personnelles de cette application, le
débat a déjà eu lieu sur un post plus tôt cette semaine. Pour ceux que ça intéresse la
description complète du système qui fait fonctionner l’application est disponible en libreaccès
sur Github : https://github.com/minvws/nl-covid19-notification-app-design
L’application utilise le Bluetooth : si un autre utilisateur de l’application se trouve proche de
vous, son smartphone et le vôtre échangeront leur code anonyme (généré aléatoirement et
changé tous les 15 jours). Les codes respectifs des personnes que vous aurez croisées et qui
étaient à proximité de vous seront stockés pendant deux semaines sur votre téléphone. Si
une personne se fait tester et est positive, le GGD sera informé et la personne donnera son
code et votre téléphone vous enverra une alerte.
Bien entendu, personne ne vous oblige à installer cette application mais son utilité ne sera
réelle que si beaucoup de personnes la télécharge.
Pour l’instant l’autorité responsable de la gestion des données personnelles (autoriteit
persoonsgegevens) n’a pas donné son aval. Il manque, entre autres, des garanties de la part
de Google et Apple.
https://www.autoriteitpersoonsgegevens.nl/nl/nieuws/ap-privacy-corona-app-gebruikersnog-
onvoldoende-gewaarborgd
Le problème devrait être rapidement résolu.
Il est remarquable de voir que la population en général accueille favorablement cette
application, mettant en avant la lutte contre la pandémie, celle-ci prévalant sur le très faible
risque de fuite de données personnelles.
Vous en avez assez des mesures corona ? Savez-vous comment vous en débarrasser au plus
vite ? En vous y tenant.
Merci d’avance pour vos commentaires. Nous nous efforçons de répondre au plus vite à vos
questions. Comme toujours et comme c’est la règle, nous restons courtois entre nous.
Nous vous souhaitons un bon week-end et une bonne semaine.
Julia Drylewicz, biostatisticienne et immunologiste, UMC Utrecht.
Xavier Falières, médecin anesthésiste, Albert Schweitzer Ziekenhuis, Dordrecht.
Remerciements : Bénédicte Bone, Jacques Perconte, Christophe Dumont.
Relecture : Maryse Imbault

Partager cet article:

Laisser un commentaire

Les champs marqués d'un astérisque (*) sont obligatoires (votre adresse de messagerie ne sera pas publiée).


La période de vérification reCAPTCHA a expiré. Veuillez recharger la page.

Partager cet article

Facebook
X
LinkedIn
Email
Pinterest
WhatsApp