Paul Spits, heureux petit patron en free-lance d’Amsterdam-vélo et d’Amsterdam-Evenements, deux start-up spécialisées dans le tourisme dans la capitale touristique des Pays-Bas. © Ouest-France
Les start-up innovantes pullulent et le chômage est tombé sous les 7 %, à l’heure où La Haye prend la présidence du Conseil de l’Union Européenne.
Amsterdam. De notre envoyée spéciale
Tout roule pour Paul Spits au royaume des 17 millions de vélos, autant que d’habitants selon la légende. Cet entrepreneur de 29 ans est né dans la région du monde « qui a inventé le business, la Bourse et le marketing ». Et connu son premier krach boursier… en 1636, avec l’effondrement des cours du bulbe de tulipes.
Cet Amstellodamois – « de la rivière Amstel et de dam, la digue ! » – adore jouer les guides. Fils d’un commercial de Zaandam, ville historique des moulins industriels, il a tout misé sur le secteur du tourisme. Lors de ses études, son école de commerce a ouvert une section Création d’entreprise, dans laquelle il s’est engouffré. « Mes profs m’ont dit que j’avais trouvé LE super créneau », lance-t-il, avec un sourire franc et malin.
Ce sujet du roi Willem-Alexander a songé aux origines de Paulette Falourd, sa mère, Vendéenne de La Sicotière, près de Pouzauges, décédée trop tôt. « J’ai déposé tous les noms français qui tournent autour d’Amsterdam, du vélo, du tourisme… » Un bon marketing et le bouche-à-oreille du Net ont fait le reste.
Paul rafle l’essentiel du marché francophone. Il emploie une quinzaine de guides, des animateurs, un comptable. Il possède sa propre flotte d’une centaine de vélos… Sans salarier personne : « Tout le monde est en free-lance, comme moi. Le code du travail est trop protecteur ici. Un patron peut se retrouver à payer un salarié en congé maladie pendant deux ans ! » Depuis le 1er janvier, cette période a été raccourcie à six mois et plafonnée à 75 000 €.
Malmenée par un patronat devenu méfiant, la jeunesse semble avoir choisi l’indépendance, plutôt que les stages à répétition. Selon CBS (équivalent de notre Insee), les Pays-Bas comptent un million d’entrepreneurs free-lance et 77 % des jeunes travaillent dans des start-up. Une dynamique qui a contribué à faire baisser le taux de chômage à moins de 7 %, fin 2015.
« 52 % d’impôts »
Tous ne connaissent pas le succès de Paul, qui va bientôt atteindre la 4e tranche fatidique des impôts. Elle regroupe les contribuables qui gagnent au moins 57 585 € par an et versent 52 % de leurs revenus à l’État (la première tranche, entre 0 € et 19 822 €, est imposée à 36,50 %).
« C’est beaucoup, mais plutôt bien vécu, explique-t-il. Amsterdam dispose de 60 % de logements sociaux, les crèches fleurissent et on ne voit pas de mendiants dans nos rues, comme à Paris. » Une loi interdit de dormir dans la rue, de jour comme de nuit. La police veille à ce qu’elle soit respectée, y compris par les fumeurs de cannabis fatigués, à la sortie des coffee-shops.
Paul se dit peu « politisé ». S’il vote, c’est « socialiste ou D66 », ce nouveau parti progressiste, pro-européen et vert qui a séduit les bobos d’Amsterdam. La crise de 2008 a laissé des traces dans son pays capitaliste : des milliers d’épargnants n’ont plus rien pour leur retraite et un taux d’endettement privé de 200 %.
Mais le temps du business est revenu, mené tambour battant par une génération créative et polyglotte, « un mixte de droite et de gauche, de néerlandais et de marocain (première nation en nombre d’immigrants), de protestant, de juif, de catholique, de musulman ». Le populisme qui grignote le pays n’atteint pas les bars feutrés d’Amsterdam. On n’y lit pas les éditos va-t-en-guerre du Telegraaf ; on n’y regarde pas The Voice ou Big Brother, émissions de téléréalité néerlandaises…
Christelle GUIBERT.